
Un banc public est une invitation à la halte et à la contemplation. Il représente un espace de ressourcement et de disponibilité physique et psychique. Seul.e ou accompagné.e, on s’y pose, on s'y repose, on s’y expose, on y attend. On peut le percevoir comme une métaphore du cadre analytique, offert, stable, immuable, mais aussi vide, prêt à être investi, à accueillir ce qui surgit.
L’eau est insaisissable, impalpable et potentiellement immaîtrisable. Elle envahit tout sur son passage, elle déborde, elle engloutit, elle recouvre la surface et noie les contours. La montée brusque et imparable des eaux d'un étang* faisant d'un banc une île temporaire m'évoque une irruption du refoulé, une montée des contenus inconscients rendant inaccessible le lieu de la parole ou de la pensée.
Ce débordement peut symboliser :
- une crise psychique, où le sujet est cerné par des affects non symbolisés,
- une régression, où les limites du Moi sont submergées par des pulsions,
- un engloutissement émotionnel barrant temporairement l’accès au lieu du travail psychique,
- un chavirement du cadre analytique du fait d'événements de vie.
Mais ce qui est inaccessible n’est pas perdu. Il est seulement en attente d’être re-trouvé, ré-intégré. Le banc immergé illustre la résilience du cadre et l'insistance du désir de comprendre. En interrogeant la temporalité du psychisme - il y a des moments où l’on ne peut pas s’asseoir, où l’on ne peut pas penser, mais cela ne signifie pas que le lieu de pensée a disparu - le banc immergé appelle à un travail aussi courageux que fécond de mise en mots et de mise en sens.
*Etang de Paloumey à Ludon-Médoc (33), avril 2025