Philippe Saboulard
Psychanalyse à Bordeaux

Kintsugi


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Le kintsugi (kin = or, tsugi = jointure) est un art ancestral japonais qui consiste à réparer des porcelaines endommagées en soulignant leurs lignes de faille par l’enduit de laque saupoudrée d’or. Nulle intention donc dans le recours à cette technique d’atténuer ou de masquer les blessures de l’objet mais, au contraire, de les rendre évidentes dans le but de le magnifier. L’art du kintsugi s’appelle kintsukuroi (« raccommodage à l’or »).

« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme.» (citation inspirée de Lavoisier)

Il m’arrive d’inviter des consultants à substituer à l’adjectif « faible » qu’ils emploient pour qualifier leurs réactions face à une situation pénible, celui de « vulnérable ». Oserions-nous avoir envers un ami le même manque d’indulgence que nous avons envers nous, en lui assénant : « tu es faible » ? Et ce d’autant que nos limites sont souvent le reflet de nos conditionnements. La vulnérabilité (lat. vulnerare = blesser) traduit autre chose. C’est la capacité à reconnaitre ses émotions et à accepter de se laisser toucher par elles, que ces émotions soient communément qualifiées de « positives » ou « négatives ». Quand on change le mot on change la nature des choses et, partant, la conception qu’on s’en fait. Nos identifications à des pensées sclérosées peuvent alors être mises en question.

Je dois aux fêlures qui sont les miennes d’être devenu psychanalyste. Les cicatrices qui témoignent des balafres de mes jeunes années que j’ai suturées par les mots issus de ma parole constituent des poinçons d’authenticité discrets aux yeux de mes consultants mais qui me permettent de revendiquer ma pleine légitimité pour écouter et soutenir ceux qui ont fait le choix de me rencontrer pour m’amener avec eux sur leur chemin de vie parcouru et à parcourir. Et même si parfois ça craquelle un peu nécessitant un coup de pinceau supplémentaire, c’est normal. Et, quelque part, pas bien grave : "Heureux les fêlés car ils laissent passer la lumière" (titre du dernier roman de Raphaëlle Giordano, octobre 2023).


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